L’Avent est le temps liturgique de quatre semaines précédant la fête de Noël – Le Robert.
Les premiers jours, N/nous avons reçu. Il y a eu des temps sociaux importants, j’ai même rencontré de nouvelles personnes (relatives à l’emploi de Maître). Ça a été aussi une période riche en sorties, même si j’imagine que ma manière de définir période riche en sorties ne veut pas dire qu’elles étaient vraiment nombreuses en quantité, simplement qu’il y en a eu plus que d’habitude.
J’appartiens à un Maître qui a toujours veillé à ce que mon monde demeure relativement petit, que ce soit en terme d’accès à certaines connaissances ou d’interactions/relations sociales qui viendraient l’élargir.
Depuis que Maître a convenu que je serai la majeure partie de mon temps du bon côté de la porte d’entrée de Sa maison (c’est-à-dire à l’intérieur – pas/peu d’activités en dehors, ni de travail, ni d’études), Il a pu incorporer dans mon dressage un nouveau type d’isolement.
Il y a depuis quelques temps maintenant deux types d’isolements, ou plutôt deux formats différents d’isolement. L’isolement prononcé (que je traiterai plus tard), qui est celui au quotidien, même s’il a en fonction des périodes été plus flexible ou plus intransigeant, et l’autre.
Maître l’appelle le plénier.
Il se résume aisément par aucune interaction sociale de n’importe quel type autre que Maître (précision importante), aucune sortie. À cela, s’ajoute généralement (et généreusement) un jeûne d’écrans. Il n’y a aucune entorse, je n’adresse la parole et n’écris à personne, ni ne sors (même pour les courses), sinon cela ne correspond plus au format plénier.
Ce n’est pas une expérience perverse, rien n’est pervers ou déviant dans N/notre (future) union.
Force de répétitions, Maître a récolté les bienfaits de cet isolement sur l’isolement prononcé/du quotidien, nettement mieux vécu (même dans sa forme où ne demeurent que très peu de permissions) sur le long terme. Il y a une sorte de pensée flottante de plus dur existe, contente-toi de ce que tu as car ce n’est pas dû – rien ne l’est ici, sauf moi.
Et je Vous remercie, Maître, pour cette dur leçon.
Ce format d’isolement, le plénier, n’est pas pour plusieurs raisons tenable en permanence. Très restrictif, il finit tôt ou tard par limiter Maître – Ses mots. Faire les courses, avoir une interaction sociale autorisée (ou nécessaire), une entracte est vite arrivée mais il s’agira d’une manière systématique d’isolement prononcé. Même si ce n’est qu’un mot, même si ce n’est qu’une sortie.
Savoir qu’il ne peut durer toute la vie ne le rend pas moins difficile. L’isolement prononcé (celui au quotidien) a un spectre très large et Maître joue sur son aspect aléatoire. Le plénier est plus clair dans mon esprit, je ne m’interroge plus sur ce qui sera permis ou non car aucun des aspects que ce format d’isolement couvre ne l’est.
Cela fait un peu plus d’un an que Maître a intégré cet isolement à N/notre dynamique de manière prolongée. Avant, ce n’était que quelques jours. Maintenant, ça se compte en semaines. C’est devenu beaucoup plus facile pour Lui de maintenir ce format maintenant que je suis en permanence à demeure.
Parfois, j’angoisse à-propos de la mort sociale. Il n’y a qu’un pas entre l’angoisse et l’ingratitude, ici. D’autres fois, j’ai simplement peur de ce que cela pourrait faire à mon cerveau, sur le long terme. Il y a aussi simplement des moments où je me sens très seule. Pas que je bénéficie de beaucoup de temps ou même de diversité sociale en temps normal, mais que j’ai appris à me satisfaire du peu de quantité pour en créer une sorte de qualité constante, ou plutôt qui me convient.
Alors, quand je suis privée de ce que je considère être mon minimum, il arrive que je souffre. Je sais que mon minimum est sûrement considéré comme un dixième du minimum généralement admis, mais j’ai appris à m’en contenter. Si les premiers jours ont été plutôt douloureux et mes pensées troubles, le constat sur le long terme est on ne peut plus clair (et sûrement affreux de bien des façons pour les plus sensibles).
Je n’ai rien à envier ailleurs, dans le sens où rien ne m’attend de l’autre côté (le mauvais) de la porte d’entrée de Sa maison. Le plus dur est lorsqu’Il part, même si la présence des animaux fait un pont au-dessus de Ses absences. Le bilan est cruel. Pour la première fois de mon existence, je pense (à raison) que je n’ai pas le moindre ami. Je suis indisponible. Je ne traiterai jamais une autre personne que Lui comme une (ma) priorité, je peux disparaître du jour au lendemain sur Son ordre et je ne peux apprécier quelqu’un durablement pour ce qu’il est, simplement parce que c’est ce qu’Il veut. Je ne peux avoir le moindre ami. Le bilan est cruel, le bilan est honnête.
Maître est Le centre de mon existence.
Lorsque cette réflexion m’a traversée (de ne pas avoir d’ami, ni de pouvoir en être une convenable), j’en ai immédiatement informé Maître lorsqu’Il est rentré du travail – l’intimité ne sied pas à ce qui Lui appartient. Maître a semblé heureux, du moins Il n’a pas spécifié vouloir que cette pensée change, ce qui est suffisant ici pour que je sache que je suis sur la ligne qu’Il a minutieusement tracée – Maître ne s’accommode pas de mes pensées si elles ne sont pas alignées aux Siennes.
Je sens une solitude, que j’accueille avec humilité.
Et je Vous remercie, Maître, pour cette terrible leçon.